Fédération des Associations Franco-Allemandes pour l’Europe
Au service des associations franco-allemandes, faire lien et être plus fort ensemble

Tribune

Le 55ème anniversaire du traité de l’Élysée, un rendez-vous raté ?

27.1.2018 Tribune 0 Commentaire

Avertissement : Cette rubrique « Tribune » est un lieu de libre expression qui n’engage pas la FAFA pour l’Europe.


Le 22 janvier de cette année du 55e anniversaire du Traité de l’Élysée était une nouvelle fois une occasion idéale pour faire le point, prendre un peu de distance et se pencher sur l’état du « franco-allemand », à commencer par cette « association » intime qui lie nos deux États et qui se prolonge dans l’activité nos associations locales,  leurs unions régionales et nationale, et qui permet de nouer quotidiennement, sur le terrain de nos sociétés civiles, des amitiés européennes chaleureuses et durables.

Alexandre Wattin Président de l’ORFACE fait ici un diagnostic remarquable, long et détaillé qui mérite toute notre attention.


Voir le site de  l’ORFACE en bas de cette page


« II était déçu, nous aussi je dois admettre on était un peu déçu”. Franziska Brantner députée écologiste traduisant les sentiment du président Wolfgang Schäuble.

« C’est la honte, moi qui suis contre cette histoire j’étais là. C’est la France par-dessus tout qui doit l’emporter, y compris avec nos amis allemands ». Jean-Luc Mélenchon

La société civile franco-allemande dans son ensemble, les Comités de jumelage, l’Office Franco-Allemand pour la Jeunesse et toutes les associations de jumelage qui œuvrent pour certaines depuis 1945 à la réconciliation puis à l’amitié franco-allemande ont dû se sentir bien seuls… en ce 22 janvier 2018.

Alors que président de l’Assemblée nationale, François de Rugy est accueilli sous un tonnerre d’applaudissements, au sein du Bundestag au grand complet et  en présence d’Angela Merkel,  nos « représentants de la Nation » ont jugé utile de bouder Wolfgang Schäuble, Président du Bundestag  et ainsi infliger un camouflet à le représentation nationale allemande.

Aux trois-quarts vide, une grande majorité de membre de l’Assemblée nationale ont montré leur arrogant désintérêt envers leurs homologues allemands venus célébrer l’amitié entre nos deux peuples. Tous ont d’ailleurs su trouver les excuses ordinairement en usage pour éviter un rendez vous jugé sans intérêt.

Capture d’écran 2018-01-27 à 10.29.33

Le Président de la République, promoteur infatigable d’une relance de cette coopération exemplaire (jusqu’à quand ?) et qui s’évertue à renouer un partenariat qui battait de l’aile depuis plusieurs années, était ainsi désavoué par la Représentation nationale élue. Avec seulement 147 députés et deux ministres la France a montré au peuple allemand comment elle considérait son voisin d’outre-Rhin.

Peut-on pour autant blâmer ces députés ? Une grande majorité n’a pas de souvenir du traité de l’Élysée et de ses conséquences sur nos deux pays depuis 1963.

Pour beaucoup d’entre eux, il n’existe plus, à vraiment dire, de dialogue entre les acteurs institutionnels et non institutionnels. Au niveau des collectivités territoriales, le constat est moins sévère, mais force est de constater que nos élus privilégient la coopération avec des pays plus exotiques ou en voie de développement en délaissant totalement la relation bilatérale avec l’Allemagne.

Je profite donc de cette tribune pour  rappeler que ce sont de simples citoyens français et allemands, ainsi que leurs familles, qui restent les derniers piliers de la relation franco-allemande. Aussi est-ce pour moi l’occasion de rappeler à nos élus l’importance du lien franco-allemand si l’on veut véritablement renforcer l’Europe.

L’ensemble de la société civile franco-allemande est unanime sur un point : il est fondamental de relancer et faire connaître les nombreuses institutions créées depuis 1963 afin de permettre au plus grand nombre de se rendre compte de l’existence de ce formidable maillage associatif bilatéral.

A ce sujet la création en janvier 2003 du Secrétariat général pour les Affaires franco-allemandes avait été accueillie avec beaucoup d’enthousiasme. Il devait donner plus de poids aux structures de la société civile franco-allemande et soutenir les nombreuses actions en faveur du rapprochement bilatéral. La société civile dût rapidement déchanter …..

Mise en sommeil de la Commission Interministérielle France-Allemagne

Je profite de l’occasion pour évoquer, en quelques lignes, le rôle incontournable qu’occupait, jusqu’en juillet 2003, dans la bonne marche de la coopération bilatérale, la Commission Interministérielle de Coopération France-Allemagne avant sa mise en sommeil.

En effet celle-ci, et bien avant l’OFAJ, fut la première organisation officiellement instituée par le Traité de l’Élysée. L’Article 4 du chapitre I du Traité de l’Élysée a institué et défini, en ces termes, le rôle de la Commission créée dans chaque pays :

« Dans chacun des deux pays, une commission interministérielle sera chargée de suivre les problèmes de la coopération..» (cf. le texte du traité).

Durant de très nombreuses années le rôle de la Commission a été relativement moindre. Ce n’est qu’à partir de 1986 qu’elle a su prendre son véritable départ, à une époque où les coopérations sectorielles, entre les deux pays, étaient devenues extrêmement denses et variées.

On a su tirer pleinement parti du fait qu’il y avait un coordinateur dans chaque pays et que ces précurseurs du « couple franco-allemand » soient en complète symbiose. Ce lien direct et étroit tissé entre la Commission et ses divers collègues allemands a permis de mener de véritables actions communes et de soutenir des initiatives conjointes.

Le Président et son homologue allemand, étaient invités à participer, comme membre de droit, aux Sommets franco-allemands, un aspect peu connu du grand public alors qu’ils y défendaient les intérêts de la société civile.

Ils avaient le privilège de clôturer le Conseil par une déclaration finale. Structure modeste en moyens, mais néanmoins efficace par l’engagement de tous les acteurs externes et internes, elle était devenue la plaque tournante des relations entre les Cabinets ministériels et le monde de la société civile franco-allemand.

Pour des raisons évidentes d’organisation, de préparation et par manques d’effectifs, des dossiers thématiques relevant de la diplomatie en sens propre du terme relevaient de la Direction Europe du Ministère des affaires étrangères avec laquelle la CICFA entretenait d’excellentes relations. Cette répartition des responsabilités a permis à la Commission d’agir dans un cadre très large de coordination.

Dans son rôle interministériel, la Commission réunissait des hauts fonctionnaires (chargé de suivre les affaires franco-allemandes) membres des différents départements ministériels. Les réunions informelles réunissaient les responsables désignés sur des thèmes relatifs aux problèmes des deux pays. Deux réunions annuelles étaient prévues et consacrées à l’étude de la coopération dans les divers domaines bilatéraux.

La Commission a toujours su s’adapter à l’évolution des relations. Les relations privilégiées qu’entretenaient la Commission avec l’ensemble de la société civile et les administrations et personnalités allemandes lui permettaient de jouer un rôle discret mais très important dans l’intensification des relations entre la France et l’Allemagne.

Ses missions se définissaient ainsi :

  • Jouer un rôle d’observateur de la situation intérieure de l’Allemagne sur l’état de la relation franco-allemande
  • Servir d’interface entre les pouvoirs publics d’une part, les collectivités territoriales et les associations impliquées dans des activités de coopération avec leurs homologues allemandes
  • Entretenir le dialogue avec les responsables allemands et français par des contacts et des entretiens informels
  • Prendre la température des relations bilatérale en animant une réflexion sur la relation franco-allemande
  • Organiser des réunions sectorielles pour évoquer les sujets de la coopération franco-allemande d’actualités
  • Proposer, le cas échéant, la mise en œuvre d’actions et de mesures nouvelles pour renforcer cette coopération quel que soit le domaine
  • Participer aux commémorations et intervenir au sein des associations pour leur venir en aide
  • Travailler en étroite coopération avec l’OFAJ et les autres grandes institutions franco-allemandes
  • Rédiger le rapport destiné au Président de la République et au Premier Ministre, dans lequel il fait état de son analyse de la situation politique, économique, culturelle et sociale en Allemagne, telle qu’il l’avait perçue au cours de ses déplacements et à l’occasion de ses rencontres avec ses différents interlocuteurs.

La pertinence des analyses de la Commission et le travail fourni ont conduit à l’époque le Président Chirac et le Chancelier Schröder à faire jouer aux deux Coordinateurs un rôle complémentaire au service des nombreux acteurs de la coopération civile.

Ainsi le Président et ses collaborateurs se rendaient régulièrement en Allemagne où ils rencontraient des représentants des milieux politiques, parlementaires, économiques, culturels et associatifs.

A l’occasion des Sommets franco-allemands de Potsdam (novembre 1998) et de Toulouse (mai 1999), le Président de la République et le Chancelier avaient mis l’accent sur l’importance de l’implication de la société civile dans le développement de la coopération bilatérale et des relations entre les deux pays et ont orienté la mission des deux coordinateurs vers un rôle de mobilisation et d’encouragement des sociétés civiles des deux pays, notamment les milieux associatifs et les collectivités locales à travers les jumelages, ainsi que des relais entre celles-ci et les pouvoirs publics.

Dans le cadre de cette nouvelle mission, de nombreuses initiatives avaient été prises :

  • L’adoption de mesures destinées à mieux prendre en compte en France la spécificité allemande
  • Le renouvellement des formules d’échanges entre les deux sociétés
  • L’ouverture à une dimension européenne, voire internationale, de la coopération  franco-allemande, sans pour autant banaliser les échanges bilatéraux.

L’établissement de nouvelles solidarités franco-allemandes dans le domaine de la communication avaient permis de confier aux coordinateurs, la responsabilité éditoriale et le suivi du site Internet « réseau franco-allemand » inauguré lors du Sommet de Toulouse.

Confronté à un certain nombre de problèmes techniques et administratifs ce site n’a pu être opérationnel qu’à compter de 2003. La CICFA a par ailleurs contribué à l’organisation et participé à d’innombrables réunions de travail, de colloques d’experts, de conférences et de manifestations dans des domaines aussi variés que ceux de la culture, de l’éducation, de la promotion du français en Allemagne et de l’allemand en France, du sport, des échanges de jeunes, de la santé, de la défense, de la politique sociale, fiscale, commerciale et de l’emploi, du devoir de mémoire, etc.

La Commission entretenaient d’excellents rapports avec le bureau de la regrettée Brigitte Sauzay, conseillère pour les affaires franco-allemandes auprès du Chancelier Schröder, avec notre Ambassade à Berlin et avec tous les postes consulaires en Allemagne.

Une place particulière occupaient les relations très amicales avec le Ministre plénipotentiaire allemand en charge de la culture ainsi qu’avec les services de l’Ambassade d’Allemagne à Paris. Cet ensemble de mesures permettaient, par un réseau très dense basé sur un vieux relationnel, de remplir le rôle qui lui est dévolu au sein des structures intervenant dans la coopération franco-allemande. Par sa participation à des manifestations d’amitié franco-allemandes, par sa présence active sur le terrain son rôle fut très utile et fort apprécié.

Ainsi le champ d’intervention privilégié de la Commission s’étendait également très largement à travers toutes les régions de France, en direction de la société civile franco-allemandes, afin d’être à l’écoute de leurs projets et de leurs besoins.

Cette ouverture permettait d’étendre les activités de contacts, pour les élargir au niveau national dans les deux pays afin de donner encore plus de poids.

Hélas, malgré toutes ces actions rondement menées et le remarquable travail fourni, le temps passsant, le bilan final se résume à la création d’une supra-structure binationale qui n’a aujourd’hui plus aucun lien avec la société civile et ne sert qu’à préparer les conseils des ministres bilatéraux.

Sur les jumelages franco-allemands

L’existence de la grande majorité des Comités de jumelages et autres partenariats bilatéraux associatifs remontent parfois jusqu’aux années d’après guerre. Ces organisations ont été le point de rencontre entre le passé et l’avenir, à une époque où le travail de mémoire passait par le souvenir et le travail de réconciliation, surtout après son officiellisation par le Général de Gaulle et le Chancelier Adenauer dès 1958.

Mais c’est d’abord par le rapprochement culturel que les individus se sont associés de part et d’autre du Rhin,  y compris dans les associations d’anciens combattants. Ensuite les partenariats ont souvent trouvé un degré supplémentaire d’homogénéisation au niveau communal quand se sont développés et perfectionnés les jumelages, la coopération transfrontalière puis les actions menées par la communauté des militaires français et leurs familles en poste au sein des Forces françaises en Allemagne entre 1945 à 1999.

Il n’est pas question de remettre en cause l’impérieuse nécessité d’alors qui consistait à tout faire pour rapprocher les citoyens des deux rives du Rhin pour réconcilier deux peuples traumatisés par la affres de la seconde guerre mondiale. Mais aujourd’hui, il s’agit d’avancer unnpas plus loin en « réveillant» la société civile franco-allemande avec des projets novateurs.

En effet le réseau franco-allemand, dans sa dynamique contemporaine, reste encore un vaste atelier de travail pour le futur.

En pleine crise identitaire et économique, les relations des deux populations devraient être une réponse coordonnée aux défis de la mondialisation.

On constate trop souvent encore que la majorité des Comités de jumelage sont restées marquées par l’œuvre de mémoire et sont restés aux échanges et voyages  traditionnels du XXe siècle au lieu d’élargir la relation bilatérale à d’autres projets plus en harmonie avec les intérêts des populations, des communes et des territoires.

Les élargissements successifs de la construction européenne auraient dû amener de nombreuses communes à développer des visions nouvelles autour des nécessités sociales de l’élargissement de  la « post-réconciliation ». Hélas, les acteurs de terrain, souvent vieillissants, semblent démunis dans leur perception de ce qu’est la coopération franco-allemande et le devenir d’une société européenne en pleine mutation.

On peut néanmoins affirmer qu’il y eu, depuis les années 90, interaction et que l’élan bilatéral a stimulé la projection européenne, laquelle l’a nourri en retour au fur et à mesure des progrès des élargissements.

Aujourd’hui il en existe de très actifs qui développent et encouragent des actions non seulement dans les domaines éducatif et culturel, mais aussi en direction d’un partenariat à haute valeur ajoutée économique et industriel. Ces jumelages, diffusant leur dynamique à l’échelle d’un Land et d’une région toute entière, illustrent la mutation d’un jumelage moderne et actif, contrastant avec les jumelages d’entités urbaines plus réduites où l’on en reste à des rencontres d’élus, activités freinées par le difficile renouvellement des responsables des Comités de jumelage et sans relais du côté des entreprises.

Pour la commémoration du 55ème anniversaire du traité de l’Elysée l’enjeu était de taille, car il existe encore un potentiel extraordinaire de dialogue avec notre premier partenaire politique et commercial. Il était donc absolument indispensable de donner un lustre particulier aux jumelages franco-allemands. Nous avons pu constater par nous-mêmes l’intérêt porté par les pouvoirs publics à cette journée.

Relancer les formules d’échanges

Les performances du mouvement associatif franco-allemand ne doivent pas se  mesurer en nombre de jumelages mais bien par le nombre de rencontres et de projets communs.

Les nouvelles pistes seraient l’élargissement de l’ensemble des échanges franco-allemands, non seulement au sein des Comités de jumelage, mais aussi aux associations en général, aux écoliers, aux services communaux, aux services incendie, aux forces de sécurité, aux services administratifs, aux Sous-Préfectures, aux unités de Police, etc.

Il faudrait absolument diversifier les modalités de coopération et d’échanges. Au même titre que les échanges entre les gouvernements respectifs, il faudrait trouver de nouveaux chantiers de coopération et enrichir les rencontres existantes en impliquant de nouveaux  partenariats (Chambre de Commerce, de Métiers, Agences, de tourisme, etc.)

Rajeunissement des cadres bénévoles

On constate souvent qu’après le départ des acteurs historiques des Comités de jumelage, le partenariat se réduit à des contacts plus formels, avec une moindre adhésion des populations.

Ce problème récurrent est pour l’ensemble du monde associatif. Force est de constater que privé de soutien le réseau associatif franco-allemand est en voie d’extinction, en raison de l’étranglement de la pyramide des âges. Les associations franco-allemandes éprouvent d’énormes difficultés à trouver de jeunes bénévoles, a fortiori qui prennent des responsabilités.

Le volontariat associatif franco-allemand au sein des Comités de jumelages atteint ses limites en bénévoles d’une part et financières d’autre part. Autant l’Office Franco Allemand pour la Jeunesse  peut amener des aides en direction de la jeunesse, tant les activités touchant les adultes sont vouées à la recherche de mécènes et sponsors sans grandes chances de succès.

Outre le vieillissement des cadres dirigeants, ce phénomène ne doit pas détourner l’opinion de la question centrale qui est celle du financement des associations, la création d’un fonds franco-allemand pour les adultes tel que proposé par l’ORFACE serait une piste à suivre

Fonds franco-allemand pour la société civile

La question du financement est posée de façon claire et récurrente. L’ORFACE a fait une proposition en ce sens sur les moyens pratiques qui pourraient être mis à disposition du réseau informel franco-allemand.

La création d’un véritable fonds franco-allemand pour les adultes destinés à l’ensemble des acteurs de la coopération bilatérale dans toute la France et en Allemagne serait un signe fort de la part des pouvoirs publics en direction de la société civile.

Pour commencer, une des solutions serait, entre autres, l’addition des budgets voués aux relations bilatérales tels que ceux de la FEFA, des Fonds culturels, du Prix de Gaulle Adenauer etc.

Une fois réunie, la totalité de ses fonds pourraient être gérée, par exemple, par la Fondation de France dans des conditions qui resteraient à définir.

La langue

Prenons la question récurrente touchant à l’apprentissage de la langue du partenaire. Bien qu’elle ne laisse pas d’inquiéter les gouvernements respectifs, l’apprentissage du français en Allemagne reste très faible, même dans les Länder frontaliers.

Quant à l’allemand en France, il enregistre une constante diminution et ce n’est pas l’épiphénomène de Tokyo Hôtel qui y avait changé quelque chose. Il apparaît qu’aucune solution n’ait été trouvée durant toutes ces années alors qu’il existe des pistes inexplorées qui peuvent faciliter et rendre plus ludique, auprès des jeunes, l’intérêt pour la langue de chaque partenaire.

A cause de la récession de l’enseignement de l’allemand en France et du français en Allemagne, de nombreuses rencontres franco-allemandes s’effectuent désormais à travers l’usage d’un anglais approximatif, qui creuse le fossé culturel. Tous considèrent que seule une intervention des pouvoirs publics peut donner un nouveau souffle à l’apprentissage de la langue du partenaire.

Les campagnes d’information auprès des jeunes et leurs parents, sur les modèles engagés au lendemain des  différents sommets franco-allemand, n’ont pas eu le succès escompté faute d’une politique volontariste de la part des deux gouvernements.

Pour stimuler le choix de l’allemand et du français il faut convaincre parents et élèves en utilisant de nouveaux outils docimologiques, tels que des coefficients majorés aux examens, stages croisés, présentation de cursus franco-allemands de haut niveau. Les besoins en personnel trilingue sont avérés et multiples mais peinent à être prises en compte comme une nécessité impérative.

Les clichés pernicieux sur l’Allemagne

« L’Allemagne paiera » ! La crise économique, comme toute crise qui perdure d’ailleurs, a conduit à  focaliser des craintes et des ressentiments sur un bouc émissaire. Rien de plus facile que de stigmatiser l’Allemagne. Ainsi, sous la présidence précédente, des voix s’étaient fait entendre pour critiquer la Chancelière allemande et ont ravivé des souvenirs de périodes les plus sombres de notre histoire.

La vision caricaturale et réductrice de l’archétype pangermaniste prouve la méconnaissance profonde de nos élites sur l’environnement politique et culturel de notre voisin d’outre Rhin. Le manque de reportages de terrain sur la vie allemande au quotidien, conjugué à l’incompréhension du système fédérale allemand, amène de nombreux journalistes à faire l’impasse sur un véritable journalisme d’investigation.

Pour se faciliter la tâche, et en fonction de l’air du temps, ils opèrent, entre autre, des comparaisons économiques qui n’ont aucune pertinence tant les structures économiques, administratives et politiques et même leurss environnements culturels sont différents.

Il est donc fort naturel que la méconnaissance de la dissymétrie des structures d’outre Rhin, dérivant du pouvoir des Länder en Allemagne, génèrent trop peu d’articles ou d’émission, hors ARTE, et ne rendent pas véritablement compte des ambitions et des attentes allemandes en matière de coopération européenne. Cela contribue à une déformation de l’image du partenaire dans l’opinion publique française.

Enseignement et formation professionnelle

Un désintérêt certain pour l’apprentissage de la langue du partenaire est une constante des ces trente dernières années. Bien que l’université franco-allemande à Sarrebruck soit souvent citée en exemple, la multiplication des cursus bilingues dans l’enseignement supérieur n’a que peu d’impact. En outre, l’allongement d’un an du temps des études est souvent  qualifié de dissuasif par les étudiants avec lesquels je me suis entretenu.

Malgré les actions menées par l’Université Franco Allemande, le nombre d’étudiants Allemands inscrits dans les établissements français est relativement réduit. Il en est de même pour les Français en Allemagne. L’allemand perd de plus en plus d’intérêt en France et la francophonie est, quant à elle, représentée dans les établissements universitaires allemands par les étudiants provenant d’Etats de l’Afrique  francophone !

Même si certaines spécialités ont des effets démultiplicateurs comme le Cycle franco-allemand de Sciences-Po, le master en management franco-allemande de Metz ou celui de l’ENA, ceux-ci sont largement tournés vers les affaires européennes… mais sont néanmoins des pépinières de futurs responsables économiques ou administratifs formés dans l’esprit européen.

La formation professionnelle franco-allemande

Depuis quelques années les pouvoirs publics mettent en exergue l’impérieuse nécessité de valoriser l’apprentissage professionnel et tentent de lui (re)donner ses lettres de noblesse.

L’existence du Secrétariat Franco-Allemand pour les échanges en formation professionnelle est un modèle qu’il serait judicieux de promouvoir. Le manque de publicité autour de cette organisation franco-allemande – qui est un exemple original de synergie de départements ministériels, établissements de formation et entreprises d’enseignement technique et deformation professionnelle initiales et continue – est incompréhensible.

Depuis plus de trente ans des centaines de milliers de jeunes ont participé à ce programme et ont tout naturellement gardé un lien avec l’Allemagne oo s’y sont même directement installés pour y vivre et y travailler.

Il semble que de nombreuses demandes ne sont pas satisfaites par manque de moyens financiers, alors que ces formations sont un exemple de ce que l’on peut pratiquement réussir pour promouvoir l’apprentissage et donner de nouvelles perspectives aux jeunes !

Le système de formation continue allemand permet aux Chambres de Cmmerce et d’Industrie dans les Länder de former de valider des formations diplômantes.

Ainsi les IHK (Industrie und Handelskammer) – Chambres de Commerce et d’Industrie proposent des formations dans des domaines parfois pointus, qui permettent aux demandeurs d’emplois ou aux jeunes de parfaire leur formation ou de se spécialiser dans un domaine particulier pour leur permettre de postuler pour un emploi dans un domaine déficitaire ou de doubler leurs chances.

En France il est communément donné priorité aux études nobles et longues, au sein d’universités prestigieuses ou de grandes Ecoles d’Etat ou privées. La disparité des structures entre les deux pays dans ce domaine semble obérer les échanges, car la découverte par les jeunes allemands du système de grandes écoles de notre pays transmet toujours l’image particulièrement élitiste et induit une image négative de notre système éducatif.

Pour un regroupement des associations franco-allemandes

Il serait opportun de faire réaliser une cartographie du monde associatif franco-allemand, couplé à celui des Comités de jumelages, par l’intermédiaire du réseau préfectoral, permettrait de recenser l’ensemble de ces  associations franco-allemandes sur l’ensemble du territoire  et permettrait d’opérer des fédérations.

Ce qui aurait pour conséquence à terme d’avoir un nombre d’interlocuteurs qualifiés pour engager d’une part un dialogue constructif avec les représentants de l’Etat et les collectivités territoriales et organiser en commun des assises départementales ou régionales franco-allemandes ! S’il existe bien deux Fédérations en France et en Allemagne, elles manquent de membres et sont donc peu représentatives. Or le but est de construire les ressources regroupées d’un véritable maillage d’échanges et où la communication idéale, entre le monde associatif et le monde institutionnel s’établirait de façon étagée.

Les associations s’adresseraient pour leur demande de subvention ou d’aides aux communes ou aux conseils généraux, représentations régionales et aux administrations publiques et cela permettrait de clarifier les relations entre pouvoirs publics, l’Office franco-allemand pour la jeunesse, dont les initiatives sont irremplaçables et la société civile.

En conclusion 

Acteurs et multiplicateurs de première importance pour l’avenir de la relation franco-allemande, le monde associatif et le secteur privé s’interrogent à juste titre du renouvellement de cette coopération. Le temps du face à face où la stricte priorité des formes de partenariat conditionnait le sentiment d’équité de l’un et l’autre partenaire, la phase d’observation mutuelle sont autant d’étapes révolues des relations franco-allemandes.

C’est la finalité des actions et l’aspect concret de la coopération, des acteurs qui importent aujourd’hui. 

De fait, les déclarations d’intention sont monnaie courantes et ont parfois bien du mal à se concrétiser, entre atermoiements, retards ou difficultés techniques et administratives.

Certes, le constat s’avère beaucoup moins négatif en termes d’échanges d’étudiants ou de coopération dans l’enseignement supérieur – mais les obstacles administratifs ou techniques (qu’un engagement plus affirmé des Gouvernements pourrait sans doute lever) constituent autant de freins à la mobilité et à la compréhension des deux populations.

Tous les témoignages recueillis portent la trace à la fois d’un enthousiasme et d’une analyse tempérée des évolutions en cours. Les rencontres de plus en plus régulières entre le président Macron et la Chancelière Merkel donnent un espoir de renouveau du lien franco-allemand auxquel veulent délibérément s’associer le monde associatif, car comme leurs collègues spécialistes de la coopération franco-allemande, chez ceux qui en ont fait un métier, le lien effectif et l’élan spontané vers le partenaire se développent à l’épruve des difficultés.

Le renouvellement des générations, le travail de mémoire partagée depuis plus de 55 ans, les nouvelles options choisies pour les loisirs ont déplacé les perspectives d’échanges bilatéraux.

De même que la France, en tant que destination touristique, a perdu de son attrait de l’inconnu aux yeux des Allemands, l’intérêt de la langue et de la civilisation allemande s’est trouvée comme déconnecté, dans l’esprit des français, de la reconnaissance objective de l’importance centrale de l’Allemagne en Europe et dans le monde.

Il découle de cet état des lieux qu’il est grand temps de non seulement recourir, mais aussi soutenir les associations franco-allemandes, ciment de notre cohésion bilatérale et européenne, afin de maintenir ces liens d’amitié qui nous caractérisent  et sont un exemple que nous envient de nombreux autres pays dans le monde.


Capture d’écran 2018-01-27 à 10.21.24

Allez voir aussi dans “Archives” d’autres articles susceptibles de vous intéresser.


 

 


0 Commentaires


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *