Le Frühstück (petit déjeuner)
Un démarrage en force
Alors que nombre de Français boivent hâtivement, parfois debout dans une cuisine exigüe, un grand bol de café pour se réveiller vite et, au mieux, y tremperont un morceau de baguette beurrée, les Allemands s’assoient à la table de leur (parfois très grande) cuisine – les plus « civilisés » préfèreront encore celle de la salle à manger – et mangent un copieux Frühstück (littéralement un « morceau précoce« ) avec petits pains blancs et tranches de pain complet qu’ils couvrent de charcuterie et de fromage, parfois de poisson, pour terminer avec le miel et/ou la confiture, puis d’un fruit. Ils boivent leur café filtre ou leur thé dans des tasses avec soucoupes et mangent sur des assiettes avec des couverts, comme pour un vrai repas.
NB : Rien n’est plus drôle de voir un Français s’asseoir pour la première fois à une table allemande de petit déjeuner, écarter l’assiette de la main gauche et de la droite, ramener à lui la tasse pour lui faire prendre la place de son bol coutumier.
Le dimanche, ce petit déjeuner quotidien peut se transformer en rite d’ouverture familiale de la journée. Il est de bon ton de s’y présenter lavé et habillé. Le menu du petit déjeuner s’élargit de l’incontournable coquetier avec son bel oeuf coque, si possible gardé bien au chaud sous un bonnet (en tissu molletonné ou en laine tricotée ou crochetée avec amour par grand-mère, parfois même en forme d’une de tête de poule). Autre complément dominical incontournable : un gâteau, cake (éventuellement chocolaté, le Marmorkuchen) ou, must des must, le Gugelhupf (que vénèrent aussi les Alsaciens, preuve indubitable s’il en faut que leur estomac doit avoir des origines plus germaniques que gauloises).
NB : Le Gugelhupf (pâte au levain, souvent garnie de raisins de corinthe) est plus répandu au Sud (Autriche, Bavière, régions alémaniques) d’où il semble être originaire et dans les pays rhénans. Il porte des noms variables selon les régions. Les Suisses alémaniques disent Gugelhopf. Au Nord, on dira Napfkuchen ou Topfkuchen, par référence au contentant de la cuisson (alors que le mot Gugel, surtout usité en Autriche, signifie capuche). En Rhénanie et au Palatinat, c’est le Bund(e)kuchen, en Saxe le Bäbe, en Thüringe le Aschkuchen et au Nord-Ouest le Rodonkuchen (Recettes de Gugelhupf, en allemand).
Dans les hôtels germaniques le buffet du petit déjeuner procède généralement d’un étalage de charcuteries, poisson, fromages, laitages, céréales, confitures, fruits et autres succulences souvet fatales à toutes les bonnes résolutions diététiques. Si l’oeuf coque n’y est pas présenté d’emblée, ne craignez rien, l’hôtelier vous en proposera un.
Le zweite Frühstück (second petit-déjeuner)
Dans les bureaux et ateliers ou sur les chantiers où le travailleur allemand s’active généralement depuis 7h, 7h30, au plus tard 8h du matin. Il y consommera un second Frühstück, le zweite Frühstück (un sandwich avec café filtre) à l’heure de la pause syndicale entre 9 et 10 h, à l’heure où nombre de Parisiens arrivent au travail et ont peut-être absorbé un croissant et un express sur le zinc du bistrot du coin. Autrefois, plus qu’aujourd’hui, hélas, les entreprises se devaient même de salarier un Kalfaktor (homme de corvées) dont l’une des tâches était de faire le tour des collaborateurs, enregistrer leurs besoins alimentaires et partir faire les courses à temps pour approvisionner la pause du café matinal.
Tous les travailleurs qui ne bénéficient pas de cette possibilité, emporteront leur second « Frühstück » dans une boîte spécialement conçue.
Il en va de même pour les écoliers.
Das Pausenbrot
Le matin, l’écolier allemand ne quitte pas son domicile sans son Pausenbrot, littéralement pain de pause, son second Frühstück à consommer durant le grand récréation matinale.
Le Pausenbrot basique est une charcuterie ou un morceau de fromage entre deux tranches de pain beurré (voir la photo ci-dessus). Mais tout parent normalement constitué se doit d’en donner plus et dépasser le minimum syndical du Pausenbrot du pauvre, en y ajoutant un fruit et une gourmandise révigorante.
L’équipement de l’écolier comporte d’ailleurs une boîte spéciale – la Pausenbrotdose – qui ne va pas sans rappeler le bento des nippons, tant il en existe des sortes différents, plus ou moins fantaisie ou classiques, un équipement scolaire aussi incontournable que le Ranzen, le sac à dos des écoliers allemands (qui a également conquis la France depuis quelques petites décennies). Pour voir la diversité de ces boîtes offertes sur le marché des équipements scolaire, allez sur google, tapez « pausenbrotdose » et cliquer sur images). Les snobs qui parlent l’allemand moderne diront lunch box.
Bien sûr, comme toujours et partout en Allemagne, la santé et le naturel sont de la partie : il existe donc des règles à respecter pour garantir à son enfant un Pausenbrot sain, digne d’un parent modèle (voir à ce propos l’article « Pausenbrot » sur wikipedia.de ou googlez « pausenbrot » et vous verrez apparaître une foultitude d’articles et de conseils consacrés à ce sacro-saint complément alimentaire du matin).